La matraque et le goupillon
Décidément, les vieilles traditions se perdent un peu plus chaque jour. La police ne respecte plus le droit d’asile dans les églises – pas plus que certains prêtres, d’ailleurs. « L’évacuation » brutale des trois cents Africains réfugiés dans l’église Saint-Ambroise, à l’aube du 22 mars 1996, suite à l’appel de « détresse » du cardinal Jean-Marie Lustiger, ne constituait qu’un premier test de la possible collaboration active entre la police et l’Église. Le 7 juin, dans Bayonne mis en état de siège par les CRS, dix « exilés politiques » basques sont interpellés dans la cathédrale d’où ils sortent, menottes dans le dos. Tranquillement, l’évêque de Bayonne regrette « l’occupation de l’église-mère pour un motif loin d’être religieux » et, benoîtement, condamne « toute violence d’où qu’elle vienne ». Dans l’un et l’autre cas, l’expulsion de l’église peut précéder l’expulsion du territoire français. Dans le même temps, comme il ne faut rien laisser au hasard, les forces de l’ordre s’appliquent à matraquer les militants solidaires des minorités opprimées.
Face à cette volonté d’exclure, dans la violence haineuse, comment ne pas se reporter – sans amalgame – aux années trente, en Allemagne quand les SA et les SS s’activaient à la chasse aux juifs ? La seule et fondamentale différence, c’est que l’Allemagne était livrée aux bandes racistes, alors que les hommes en uniforme, qui traquent les immigrés et les réfugiés politiques sont les représentants honorables d’un régime démocratique !
Juin-Juillet 1996
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