Non coupables
Lorsqu’on a le droit de tuer ou de laisser mourir un jeune garçon malade, on ne peut pas être coupable si l’on est policier. Les juges censés délivrer leurs sentences au nom du peuple français ne considèrent que rarement les défenseurs de l’ordre comme des justiciables ordinaires. Sauf cas de flagrant délit évident, avec témoins, de crimes avec preuve de forfaiture visible, le policier ne risque pas la même rigueur que le citoyen ordinaire. Le policier peut tuer, brutaliser, insulter, se laisser aller à des injures racistes ou sexistes, presque impunément. Cela ne regarde personne : « Circulez ! Il n’y a rien à voir ! » Il ne se passe pas de semaine ou de mois sans que la mansuétude de la justice se manifeste envers ces fonctionnaires chargés d’assurer notre sécurité et qui se comportent en hors-la-loi.
Dernier exemple en date, le verdict « frappant », le 20 mars, des deux policiers de Mantes-la-Jolie qui ont causé la mort d’un jeune Français de 19 ans, nommé Aïssa, le 27 mai 1991 : dix mois de prison avec sursis. Pas coupable donc, et il aura fallu dix ans de procédure pour en arriver à ce verdict. Ces policiers étaient si peu coupables que, trois jours après le décès du garçon dans une cellule du commissariat de Mantes-la-Jolie, nous rappelle L’Écho des Cités (février 2001), sa mère recevait une lettre anonyme immonde : « Vos enfants ne sont pas des saints, étant plus racistes que les Français. Par contre, moi, je suis devenu très raciste à cause de ces Arabes. Ne touchez plus à la police car j’en fais partie et je n’hésiterai pas à tuer tous ces Arabes qui referont de la casse. N’oubliez pas que vous êtes en France ! » Par leur verdict, les juges de Versailles ont également banalisé ce langage ignoble qui nous renvoie à un passé peu glorieux de la police de ce pays.
Avril 2001
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