quefaitlapolicelogo QUE FAIT LA POLICE ? – Bulletin d’information anti-autoritaire – Nouvelle série – numéro 38 – mars 2010


Editorial :Circulez, il n’y a rien à voir !

Peut-être l’avez-vous remarqué, à la lecture du dernier numéro de Que fait la Police ?, il semblerait que les dérapages policiers ont diminué, en janvier 2010. Qu’en est-il exactement ? Comme la source de nos informations réside essentiellement dans la presse, il nous faut bien constater que la colonne des faits divers, où sont relégués les petites dérives ou les bavures en vraie grandeur, sont désespérément vides. D’ailleurs, des quotidiens aussi sérieux que Le Monde ou Libération, on considérablement réduit leurs petites colonnes de « brèves » qu’il est possible de recueillir dans les dépêches de l’AFP. Comme si le citoyen ordinaire n’avait pas à s’inquiéter du comportement de la police républicaine. Il en va également ainsi du Parisien, au travers de ses multiples éditions, en Ile de France, où l’intérêt porté aux troubles à l’ordre public provoqués par des fonctionnaires agissant sous la pression de l’obligation de résultat imposés par leur hiérarchie, paraît nettement moins évident. Même des journaux gratuits, comme Métro ou 20 Minutes, intéressés il y a peu par les faits et gestes de nos gardiens de la paix, évitent de trop s’étendre sur ce sujet. Bien souvent, c’est au travers d’une information entendue rapidement sur France Info ou sur France Inter, qu’il est possible d’apprendre qu’un policier ne s’est pas très bien conduit. Faudrait-il en conclure que le corps policier s’est apaisé, et que la population de ce pays n’est plus considérée comme globalement suspecte, au point que ses relations avec les forces de l’ordre se seraient réellement améliorée ? Ce serait trop beau ! A rebours, comment expliquer que, bon an mal an, environ 3 000 policiers de tous grades comparaissent devant les Commissions de discipline de la police nationale. Cela pour des motifs dont le détail ne nous est jamais communiqué par voie de presse. Faut-il donc conclure de ce constat que, à part quelques grosses bavures éminemment médiatiques, la presse n’hésiterait pas à s’autocensurer elle même sans y être véritablement contrainte ? Il semble que l’attitude de la presse régionale soit également identique. Dès lors, comme il parait peu vraisemblable que la police soit devenue authentiquement citoyenne, il faut bien se résoudre à admettre que nous ne devons pas nous intéresser au mode opératoire de notre police. En clair : circulez, il n’y a rien à voir !

Maurice Rajsfus

Carnaval
A Nice, le 21 janvier, lors de la grève des fonctionnaires, des policiers ont rudement interpellé des manifestants qui défilaient, avec sur le visage un masque de carnaval représentant Nicolas Sarkozy. Ainsi, avant même que soit votée une loi interdisant le port de la burqa, les policiers avaient décidé, de leur propre chef, d’appliquer une loi non écrite interdisant que l’on puisse se moquer du chef de l’Etat. Comment oublier, qu’il a quelques années, lors du procès fait à Charlie Hebdo par des intégristes islamistes, Nicolas Sarkozy avait pris la défense de cet hebdomadaire, au nom du droit à la caricature. Peut-être que nos fins limiers s’étaient référés à l’interdiction faite aux jeunes des cités de se couvrir la tête d’une cagoule ? Bientôt, il sera peut-être interdit de brocarder la police car, n’est-ce pas, il y aurait outrage !
(D’après France Inter, 22 janvier 2010)

Rions un peu
Le 21 janvier, Fadela Amara, secrétaire d’Etat à la ville déclarait, deux jours après la mort du jeune Malek, à Woippy : « Aujourd’hui, nous avons une police qui est dans la diversité, très respectueuse, même s’il y a quelques dérapages, des contrôles abusifs qui ont tendu les relations entre les jeunes des cités et la police… » (Cité par Libération, 22 janvier 2010)

« Gardés à vue »
Contrairement au chiffre fourni par le ministère de l’Intérieur, ce ne serait pas quelque 600 000 garde-à-vue mais près de 900 000 qui auraient affecté les Français, en 2008. Le journaliste Matthieu Aron, lui-même placé en garde-à-vue pour un délit mineur, en 2004, a mené l’enquête auprès de victimes de l’acharnement policier qui a suivi les lois Perben et Sarkozy, en 2003 et 2004. Il a rencontré des hommes et des femmes, qui ont découvert, avec effarement : « …les menottes, les fouilles au corps, puis l’attente durant des heures dans des locaux insalubres. Certains en sortent traumatisés. » Matthieu Aron constate ce « système incontrô1é, fruit de décisions empilées les unes sur les autres. La machine s’est emballée mais personne ne sait comment l’arrêter ! » A lire absolument. (Gardés à vue, de Matthieu Aron. Les Arènes, 274 pages, 18 euros 50)

Comptine
Ce gentil couplet aurait pu être fredonné par les étudiants révoltés, en mai 1968, à une époque où la police ne restait jamais inactive au quartier latin :
« Le gros indic
Hypodermique
Nous fait la nique
Son imper mastic
Donne la colique
Il nous pique
C’est un aspic
Pique nique douille
C’est toi l’andouille !  »
(Et si vous preniez la suite)

Empreintes génétiques
Au I er janvier 2010, ce sont 1,3 millions de personnes qui se retrouvent dans le FNAEG (Fichier national des empreintes génétiques). C’est à dire une augmentation de près de 40% sur une année. Plus ancien, le fichier national des empreintes digitales compte déjà plus de 34 millions de traces. (Source, Libération, 25 janvier 2010)

Forte pensée
Dans son Dictionnaire des citations, Raoul Vaneigem rapporte ce propos de Marc-Pierre de Voyer d’Argenson, lieutenant de police à l’époque de la Régence, en 1720, que Louis Thomas avait cité dans l’Esprit du XVIIIème siècle :
 » On reprochait à d’Argenson de recruter dans la police nombre de coquins et de fripons.
– Trouvez-moi, répondit-il, d’honnêtes gens qui veuillent bien faire ce métier.  »
I1 va de soi que, près de trois siècles plus tard, la situation morale de la police s’est nettement améliorée…

Acharnement (I)
C’est l’histoire, tristement ordinaire, d’un lycéen marocain, âgé de 18 ans qui a été expulsé vers le Maroc, le 23 janvier. Mohamed avait rejoint son père, qui vit régulièrement en France depuis I995. Ce garçon, scolarisé dans un lycée de Colombes (92), avait été interpellé, quelques jours plus tôt, à la gare Montparnasse, à Paris. C’était lors d’un contrôle de police. Motif : « consommation sur la voie publique d’alcool dans un périmètre interdit. » Cette explication étant contestée par le Réseau Education sans frontières (RESF), qui avait pris la défense du garçon. De plus, selon la préfecture de police, le jeune homme aurait « Ã©mis des menaces de mort à l’encontre des policiers, qui ont porté plainte. » I1 n’en reste pas moins que cette plainte devait être rapidement classée sans suite, vu sans doute son manque de crédibilité. Selon l’un des responsables de RESF, il ne faut pas négliger « la tendance qu’a le ministre de l’immigration à calomnier les gens qu’il veut expulser ». Au terme de sa garde-à-vue, le lycéen avait fait l’objet d’un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière. Son recours était rejeté le 1er janvier par le tribunal administratif de Paris. La procédure étant également validée par le juge des libertés. I1 reste quelques détails édifiants : l’un des enseignants du lycée Valmy de Colombes affirme que Mohamed avait déposé un dossier de régularisation, en novembre 2009 mais cette requête semble n’avoir jamais été étudiée… (Source, Vosges-Matin, 24 janvier 2010)

Faux nez
Le 14 novembre 2009, un site internet en mal de publicité avait annoncé une distribution de billets de banque, sur le Champs de Mars, à Paris. Bien entendu, cette annonce ne pouvait que provoquer des incidents violents, et les policiers présents sur le terrain, interpellaient deux jeunes, âgés de 19 et 21 ans, qu’ils accusaient de leur avoir lancé des pierres. Lors du procès en correctionnelle, le 25 janvier, les juges devaient constater que le dossier était vide. Même la présidente du tribunal allait ironiser en expliquant que sur le Champs de Mars on ne pouvait trouver que des graviers. Par ailleurs, les deux jeunes avaient été interpellés, au hasard, plus d’une heure après les faits. Est-il utile de noter que l’un d’eux se prénomme Karim ? Ce qui fait douter de la qualité de la plainte de ces policiers qui ne seront jamais poursuivis pour faux témoignage ou dénonciation calomnieuse. (D’après 20 Minutes, 26 janvier 2010)

Productivisme policier
La sortie en librairie du livre de Matthieu Aron, Gardes à vue, le 27 janvier (voir plus haut) a rapidement délié les langues. Au ministère de l’Intérieur, on admet, à mi-voix, que le nombre de gardes à vue a été sous-estimé. Très circonspect, Frédéric Péchenard, directeur général de la police nationale, expliquait que son administration était ouverte à des aménagements, tout en soulignant: « Nous ne sommes pas des acharnés de la GAV », mais en ajoutant, avec prudence : « Nous sommes en train de les recompter. » Ce haut fonctionnaire, ami de longue date de Nicolas Sarkozy, a admis malgré tout que les gardes à vue routières étaient « en forte augmentation depuis deux ans », mais sans expliquer pourquoi les délits les plus minimes permettaient aux policiers de traiter les « délinquants » interpellés comme de grands criminels. Avec menottage, fouille au corps et humiliations diverses. Rien non plus sur cette volonté de faire du chiffre, tout en se flattant du taux d’élucidation des délits les plus divers. en effet, un petit délit routier constitue une infraction rapidement élucidée… (D’après Le Monde, 28 janvier 2010)

Acharnement (2)
Le 22 janvier, une jeune femme sans papiers, originaire de Sierra Léone, refusait de se laisser embarquer, depuis l’aéroport de Biarritz, à destination du Nigéria. Elle sera finalement expulsée le 28 janvier. La CIMADE locale devait dénoncer la duplicité des policiers en faisant remarquer : « Elle est partie du centre de rétention sans ses bagages car les policiers lui avaient fait croire qu’elle ne serait pas obligée d’embarquer dans l’avion. En fait, elle a été bel et bien renvoyée vers le Nigéria où elle n’a aucune famille. C’est vraiment inhumain ! » I1 est vrai que ce sont là des habitudes policières qui ne font que se multiplier. (Source, Sud Ouest, 29 janvier 2010)

Connivence et gros clin d’Å“il
Pour les élections régionales en Ile de France, c’est le secrétaire général du syndicat d’officiers de police Synergie, Bruno Beschizza, qui a été choisi (imposé en fait) par une main invisible, pour prendre la tête de la liste UMP en Seine-Saint-Denis. Ce proche de Nicolas Sarkozy devrait rassurer les tenants de l’idéologie sécuritaire dans ce département sensible ». (D’après, Le Monde, 1 er février 2010)

Ah bon…
I1 semblerait qu’à la veille des élections régionales, la volonté du ministère de l’Intérieur soit de faire croire à une amélioration dans le domaine de la délinquance. Ce qui serait porté au crédit du pouvoir. Dans une tribune publiée sur le Net, le sociologue Laurent Mucchielli, notait récemment ce que des responsables de syndicats de policiers disaient à voix basse : « …Les policiers et les gendarmes ont reçu l’injonction de faire baisser les chiffres de la délinquance, pour permettre au ministre de l’Intérieur, au gouvernement et au président de ne pas afficher un bilan négatif au moment où l’on est entré en campagne pour les élections régionales. » Ce renversement de tendance, cet abandon du catastrophisme sécuritaire doit peut-être tout au fait, révélé par de nombreux sondages, que la population est bien plus sensible au phénomène du chômage et à la perte du pouvoir d’achat qu’à une insécurité qui a long temps servi de marche pied pour la conquête, puis la conservation du pouvoir. (D’après Libération, 3 février 2010)

Acharnement (3)
Détenue depuis le 19 janvier au centre de rétention administrative de Lyon, une jeune marocaine, Salima, âgée de 18 ans, devait être expulsée le 4 février vers le Maroc. Pendant ce temps, sa sÅ“ur jumelle se cache pour échapper à la police. Salima raconte : « Je n’ai pas de famille au Maroc. Je ne me souviens presque plus de ce pays, que nous avions quitté, avec ma sÅ“ur, quand nous avions 13 ans. Je ne sais même plus lire ni écrire en arabe. » Les deux jeunes filles, qui n’ont plus de famille au Maroc, vivaient chez une tante à Clermont-Ferrand, et préparaient toutes deux un CAP professionnel. Il se trouve que l’actuel préfet d’Auvergne, Patrick Stéfanini, ancien secrétaire général du ministère de l’immigration, a souhaité ne pas s’exprimer sur cette affaire, « pour le moment. » (Source, le Monde, 4 février 2010)

Tous ensemble…
Le 4 février, des milliers de policiers municipaux ont manifesté dans plusieurs villes de France. Leur revendication ? Que leurs grilles de salaires soient alignées sur celles de la police nationale. (Source, France Info, 4 février 2010)

CRS sous pression
Une compagnie de CRS a été retirée de l’agglomération de Bordeaux. Motif : manque de résultats. En fait, insuffisamment de délits constatés, et peu de PV appliqués aux automobilistes. Le porte-parole d’un syndicat de CRS a tenu à expliquer que les CRS n’avaient pas pour vocation à être des collecteurs d’impôt. (Source, La Dépêche du Midi, 4 février 2010)

Chiens policiers contre squatteurs
Dans la matinée du 3 février, les occupants d’un squat, installé rue de l’Echiquier, dans le I0ème arrondissement de Paris, étaient évacués par les forces de l’ordre. L’un des occupants affirme : « les policiers ont été violents, ils ont lâché les chiens ! » (Source, Métro, 4 février 2010)

Garde à vue à deux vitesses
Une homme d’une trentaine d’années, qui a connu la garde à vue, en France et en Allemagne témoigne de la différence de comportement des policiers sur l’une et l’autre rive du Rhin :  »En France, j’avais l’impression d’être un sous-homme. On te méprise, on te parle comme à une merde, alors qu’en Allemagne on te cause normalement. » Placé en cellule, à Rennes, pour un motif futile, il décrit ce lieu de non droit : « Des mégots au sol, de la merde sur les murs, avec un banc en béton, et une planche en bois pour couchette. » C’est en caleçon, sans sa montre, ni même une couverture qu’il passera toute une nuit en garde à vue. Quant à sa geôle allemande d’Aix-la-Chappelle, elle avait presque des allures de palace : « Une pièce impeccable, avec un matelas et une couverture propre. » A Aix-la-Chapelle, les policiers interrogeaient cet homme, « avec professionnalisme et courtoisie » et au petit déjeuner, c’était « limite café-tartines », tandis que leurs homologues français lui refusaient un verre d’eau… (Source, 20 Minutes, 4 février 2010)

A voile et à matraque…
Une femme fonctionnaire, agent de surveillance de Paris (ASP) était suspendue de ses fonctions, en novembre 2009, pour avoir porté le voile islamique simple dans un service de police. Le 4 février, elle devait comparaitre devant le Conseil de discipline. Affectée dans le IIème arrondissement de Paris, elle avait toujours refusé d’enlever son voile. (Source, 20 Minutes, 4 février 2010)

Chez nos voisins
Un fichier national a été mis en place, en Allemagne, pour recenser le temps de grève de tous les salariés, la légitimité ou la non légitimité d’une grève, les rappels à l’ordre à l’égard des employés, les temps de lockout. Ainsi que les raisons d’un licenciement, faute grave, refus de suivi d’ordre, inadaptation au poste… Voilà qui pourrait donner des idées à nos entrepreneurs adeptes du flicage au travail. (Source, Le Monde Libertaire, 4 février 2010)

Rigolo

Il semble que le ministre de la Justice et le ministre de l’Intérieur ne s’entendent pas très bien. Au cours des premiers jours de février, des paroles lourdes de sens ont été échangées entre les deux éminences. Ainsi, Michelle Alliot-Marie, elle-même ancienne ministre de l’Intérieur, a reproché à Brice Hortefeux la quasi absence d’interpellations lors de matches de football agités à Grenoble et à Lille. (Source, 20 Minutes, 5 février 2010)

Feu à volonté !

Le 5 février, à Marcoussis (91), un gendarme énervé a tiré à quatre reprises sur un automobiliste qui avait refusé de s’arrêter lors d’un contrôle routier, après avoir heurté un pandore. Il faut rappeler qu’en vertu d’une loi datant de 1903, les gendarmes ont l’autorisation d’ouvrir le feu après une simple sommation. (Source, France 3, 6 février 2010)

Bouche cousue

Suite à la multiplication des gardes à vue, hors de la présence d’un avocat, à la première heure – lequel n’a pas immédiatement accès au dossier – des avocats parisiens viennent de créer une association : « Je ne parlerai qu’en présence de mon avocat ! » Pour les policiers, l’accès au dossier, trop rapidement accordé, permettrait aux avocats d’informer les possibles complices de la personne placée en garde à vue. (Source, France 3, 6 février 2010)

Calais : nouvel exploit des CRS

Le 6 février, à Calais, une centaine de migrants sans papiers, majoritairement Afghans s’installaient dans un hangar loué par le mouvement altermondialiste No Border. Eric Besson ne tardait pas à réagir et, dans l’après-midi du 7 février, une quinzaine de fourgons de police, avec une centaine de CRS, encerclaient le bâtiment. Après avoir forcé la porte du hangar, dont les occupants étaient partis, pour ne pas être interpellés, les CRS chargaient avec la plus grande violence les militants de No Border – une militante aura le nez cassé d’un coup de matraque. (Sources, Libération et France Info, avec images significatives sur France 2 et Canal +, 7 et 8 février 2010)

Faux témoins

Le 25 novembre 2007, à Villiers-le-Bel (95), un véhicule de police heurtait une mini moto sur laquelle circulaient deux adolescents. Tous les deux tués lors du choc. Plusieurs jours de révolte secoueront cette localité de banlieue dans les jours qui suivront, et plusieurs jeunes seront condamnés pour violences envers la police.
Suite à une longue enquête, une ordonnance de non lieu sera rendue par un juge d’instruction, et les policiers innocentés. Lesquels avaient affirmés qu’ils roulaient à faible vitesse. Le 8 février 2010, l’avocat des familles des deux victimes annonçait avoir porté plainte pour « faux témoignages » contre les policiers, leurs déclarations « contenant des affirmations manifestement contraires à la vérité. » L’avocat Jean-Pierre Mignard précise : « Nous avons demandé en vain l’audition des policiers. Un rapport d’expertise judiciaire contredit leurs déclarations sur les circonstances de l’intervention. Il est établi que le véhicule de police est passé de 57 Km/h à 64 Km/h sur 16 mètres. Or, les policiers ont nié toute accélération. Ils ont prétendu rouler à une allure normale, dans le cadre d’une patrouille de routine. On sait, par l’analyse des échanges radio, qu’ils venaient prêter main forte à la brigade anticriminalité. Pourquoi n’ont-ils pas dit la vérité ? » A suivre, bien entendu. (Source, Libération, 9 février 2010)

LOPSI II

La loi LOPPSI II (Loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure) était présentée devant l’Assemblée nationale, le 9 février. Pour le syndicat de la Magistrature, il s’agit d’un « cauchemar sécuritaire ». Cela va du terrorisme à la délinquance routière, en passant par la lutte contre la pédophilie. Ce texte de loi, qui s’ajoute à bien d’autres, en s’y superposant le plus souvent, est censé fixer la feuille de route de la police et vde la gendarmerie, pour trois ans. Dans ce petit chef d’œuvre sécuritaire concocté par les services de Brice Hortefeux, il est même envisagé de faire intervenir les juges sur certains sites web, si nécessaire, voire l’espionnage à distance des ordinateurs. Il n’empêche que certaines mesures, comme la possibilité pour les préfets d’instaurer un couvre-feu pour les mineurs de moins de treize ans, ou encore le renforcement des peines encourues pour les vols commis à l’encontre des personnes vulnérables, sont déjà prévues. En fait, sous le motif de mieux sécuriser les citoyens, le contrôle social ne ferait que s’amplifier, tandis que l’on oublierait de s’inquiéter du chômage ou de la perte de pouvoir d’achat d’une partie de la population. (D’après 20 Minutes, 9 février 2010)

En voiture, Brice !

Le 9 février, la Cour des comptes présentait son rapport annuel. Parmi les éléments de mauvaise gestion de l’Etat, relevés par les magistrats, il y a les dépenses faramineuses de la police en matière de véhicules. Ainsi, en 2008, les services centraux de la police auraient eu à leur disposition 1.460 voitures banalisées, soit une augmentation de 21 % depuis2003, « sans réelle justification ». Il y a plus grave : « La moitié de ces véhicules se trouve suréquipée, avec des motorisations inutilement puissantes, ou des aménagements trop luxueux. » Par ailleurs, ces voitures banalisées ne servent pas toujours à poursuivre les délinquants. Comme le remarque le rapport de la Cour des comptes : « Les usages à titre privé sont répandus, bien au-delà des contraintes normales du service, tout comme la mise à disposition de chauffeurs de véhicules à des personnes n’exerçant aucune fonction au ministère de l’Intérieur. » Curieusement, il a été possible d’entendre des responsables de syndicats de policiers défendre cette dérive, en expliquant que les véhicules dont ils disposent doivent être fréquemment remplacés car ils sont utilisés 24 heures sur 24.
Côté PV, il semble que la gabegie serait identique puisque, rien qu’à Paris, 15% des contraventions sont purement et simplement annulées ; soit 524.000 en 2007. Au travers de ces mesures dites d’indulgence, la préfecture entretiendrait ainsi, en toute illégalité, de bonnes relations avec les amis de l’ordre. (D’après Libération, 10 février 2010)

Salauds de jeunes…

Il était de notoriété publique que, depuis quelques années, notre président de la République s’intéressait vivement à la jeunesse de ce pays. Les ministres de l’Intérieur qui lui ont succédé, et les policiers missionnés pour traquer les ados, et même les jeunes enfants dans certains cas, ont bien retenu la leçon. C’est ainsi que, le 4 février, dans le 20è arrondissement de Paris, suite à une bagarre entre collégiens, deux jeunes filles étaient interpellées à l’entrée du collège, une troisième étant cueillie à son domicile, dans la matinée, en l’absence de ses parents, toutes trois âgées de 14 ans. Les policiers, décidément motivés, emmenaient cette dernière, en pyjama, sans lui laisser le temps de s’habiller. L’avocat des jeunes filles placées en garde à vue durant une dizaine d’heures, faisait remarquer que cette intervention policière s’était déroulée « sans le moindre discernement, eu égard à leur âge. » La mère de l’une d’elle s’indignait de ne pas avoir eu le droit de voir sa fille lorsqu’elle était au commissariat. Elle affirme que les adolescentes étaient témoins de l’incident, et qu’elles avaient simplement tenté de s’interposer. Pour l’avocat, ces trois collégiennes auraient pu être convoquées comme simple témoins, en compagnie de leurs parents, pour être interrogées. Relâchées après ces longues heures de garde à vue, entrecoupées par une visite médicale où elles avaient été conduite dûment menottées, les trois « délinquantes » sont ressorties du commissariat lestées d’une convocation par le parquet, le 16 mars, pour un rappel à la loi, après des « faits de violences aggravées en réunion aux abords d’un collège. » Curieusement, dans un premier temps, les représentants des syndicats de policiers devaient considérer cet évènement comme « mineur » (c’est le mot qui convient) s’étonnant de l’émotion que cette intervention avait pu provoquer, tout en niant le menottage des collégiennes. Comme s’il s’agissait d’une opération de pure routine. (D’après Le Monde et Libération, 10 février 2010)

Droit au logement opposable

Dans la nuit du 9 au 10 février, à Bagnolet (93), dans le froid glacial, une équipe de policiers devait évacuer plusieurs familles de Maliens qui squattaient un immeuble en péril depuis plusieurs années. Ensuite, les policiers allaient interdire aux expulsés de prendre leurs affaires, certains d’entre eux perdant ainsi leurs papiers, et même leur argent, vu la rapidité de l’expédition. La police serait intervenue à la demande de la mairie communiste de Bagnolet, en exécution d’une décision de justice. L’un des adjoints au maire justifiant cette opération en expliquant que c’était un lieu de prostitution et de trafic de drogue. Les policiers n’étaient pas venus seuls puisqu’ils étaient accompagnés d’un bulldozer, pour qu’il ne reste pas de trace. De son côté, l’association Droit au logement dénonçait les expulsions et la « destruction des biens des expulsés. » Moins de 24 heures plus tard, les policiers devaient intervenir à nouveau pour « dégager » les trottoirs où les parias s’étaient installés sous des tentes. (Sources, France Info, France Inter et 20 Minutes, 11 février 2010)

Compétences

En décembre 2009, les porte-paroles du syndicat de policier Synergie avait tenu des propos « offensants » envers les avocats, lors d’un débat sur les gardes à vue abusives. A cette occasion, les policiers de Synergie-officiers avaient estimé qu’ils n’avaient pas « de leçons à recevoir de la part de commerciaux dont les compétences en matière pénale sont proportionnelles au montant des honoraires perçus. » Suite à cette impertinence calculée, des avocats parisiens ont assigné en justice le syndicat Synergie. L’affaire sera jugée devant la 17è chambre correctionnelle de Paris, du 29 au 31 mars. (Sources, Métro, 11 février 2010)

Garde à vue des mineurs (suite)

Le 6 février, à Troyes, deux garçons de 13 et 14 ans voyagent sans titre de transport dans un autobus. Les contrôleurs font appel aux policiers qui interpellent les deux adolescents, et leur passent des menottes avant de les conduire au commissariat où ils seront placés en garde à vue, attachés à un banc par les menottes. (Source, France Info, 11 février 2010)

Du plus haut comique

Bruno Beschizza (cité plus haut), secrétaire général du syndicat d’officiers de police Synergie, proche de Nicolas Sarkozy, et tête de liste UMP en Seine-Saint-Denis pour les élections régionales, a fait une proposition étonnante : dans les transports en commun d’Ile-de-France, il faudrait réserver le wagon de tête aux femmes seules pour les protéger de possibles agressions. (Source, France Info, 8 février 2010)

Menottage et garde à vue

Jean-Claude Delage, secrétaire général du syndicat de gardiens de la paix, Alliance, réagissant aux récentes interpellations de mineurs de 13 à 14 ans, avec menottage et garde à vue, s’est montré étonné de l’indignation générale : « La collégienne de 14 ans a été menottée lors de son transport à l’hôpital parce que l’on ne sait jamais si elle ne va pas se taper la tête… » Ce propos n’a pas manqué de provoquer la réaction de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, qui déplore : « Le manque de discernement des forces de l’ordre à l’égard des mineurs qui se sentent victimes d’une injustice, et gardent une mauvaise image des représentants de l’autorité. » C’est le moins que l’on puisse dire. (Source, Libération, 13 février 2010)

Immigration, sous bonne garde policière

Suite à l’arrivée en Corse de 123 Kurdes, en janvier 2010, tous interpellés mais finalement libérés, et en mesure d’obtenir un titre de séjour provisoire. Eric Besson avait promis de modifier la loi. Parmi les mesures envisagées, la création de zones d’attente partout où seront découverts des étrangers venant de franchir illégalement une frontière. Au-delà du communiqué, combien faudra-t-il de policiers pour veiller à l’application de la nouvelle loi en gestation ? (D’après Libération, 13 février 2010)

La police au cinéma

Le 13 février, à Paris, dans une salle du cinéma UGC, près de l’Opéra, les policiers faisaient irruption de façon tout à fait étonnante. Motif : la direction du cinéma avait appelé les forces de l’ordre pour expulser une jeune femme qui était entrée dans la salle avec une canette de soda achetée à l’extérieur de l’établissement. C’était la troisième fois, en quelques jours, que les forces de l’ordre intervenaient dans une salle UGC, pour des raisons aussi futiles que l’introduction d’aliments ou de boissons achetées à l’extérieur. A la fi du mois de janvier, la police avait été requise par un directeur de salle du quartier Italie pour expulser une famille qui était accompagnée d’un enfant de moins de trois ans. Lorsque l’on sait à quel point la police est difficilement joignable pour des faits bien plus graves, cela ne peut que laisser rêveur sur sa disponibilité lorsque ce n’est pas vraiment indispensable. Il est vrai que pur chacune de ces interventions qui ne présentent aucune difficulté particulière, il y a, à l’arrivée, un délit constaté figurant dans les sacro-saintes statistiques. (D’après 20 Minutes, 15 février 2010)

Désopilant

L’officier de police Bruno Beschizza, tête de liste de l’UMP pour les élections régionales en Seine-Saint-Denis, ne cesse de faire parler de lui. Après les wagons réservés aux femmes seules dans les transports en commun d’Ile-de-France, il a suggéré que soit effectué un « sondage ethnique » auprès de ses collègues, dans le but de répertorier l’origine des policiers de ce pays. Cela dans le but de montrer que la police est un vecteur d’intégration. Tout en regrettant que de tels sondages soient interdits en France. (Source, Libération, 16 février 2010)

Stupéfiant !

Deux fonctionnaires de la police judicaire d’Orléans comparaissaient le 17 février devant le tribunal correctionnel de Saintes, pour trafic de stupéfiants. Ils sont accusés d’avoir organisé, entre 2007 et 2008, un réseau de revente de drogue, en remettant en circulation des scellées judicaires issus de leur service. Durant cette période, ces deux policiers avaient dérobé 200 Kg de cannabis, 25 Kg de cocaïne et 2 Kg d’héroïne. Ce trafic aurait permis à ces deux fonctionnaires exemplaires de se constituer une petite cagnotte de 40.000 euros chacun. Il n’en reste pas moins qu’il s’agissait de défenseurs de l’humanité souffrante. En effet, ces malins remplaçaient la poudre blanche par du plâtre, et la résine de cannabis par du chocolat. Tous deux encourent dix ans de prison. (Sources, Direct Matin et Métro, 17 février 2010)

Les forcenés en action

Le commissariat de police de la Goutte d’Or, dans le 18è arrondissement de Paris, est célèbre pour être un « établissement trois étoiles ». Un enseignant, professeur en sciences économiques, et les colocataires de son immeuble, situé boulevard Barbès, ont pu en faire la triste expérience, lors d’une fête entre voisins dans la nuit du 12 au 13 février. Vers 3 heures du matin, une locataire vient les prévenir qu’au bas de l’immeuble, alors qu’elle avait ouvert sa fenêtre, elle avait entendu un policier lui hurler de se « grouiller le cul » pour lui ouvrir la porte, munie d’un code d’accès. Une fois dans la place, les policiers expliquaient qu’ils étaient en mission pour un cambriolage. Il s’avérera, après vérification, qu’il n’y avait pas eu de plainte. Après avoir exigé les papiers d’identité des voisins présents dans son appartement, les policiers s’en prenaient à l’enseignant, qui leur demandait de se calmer. L’un d’eux, plus nerveux que les autres, lui faisait une clé au bras, le jetait contre un mur et lui passait une menotte. Ensuite, plaqué au sol, il était menotté à l’autre poignet, avant d’être roué de coups et à moitié étranglé. Entre temps, son frère, arrivé sur les lieux, était à son tour menotté et plaqué au sol, avant de se faire écraser le visage à coups de pied. Suite à ce traitement, les deux frères seront trainés au commissariat de police où ils seront placés en garde à vue durant une dizaine d’heures, menottés et sans couverture. Un de leurs amis, venu s’inquiéter de leur sort, était à son tour agressé et arrosé de gaz lacrymogène, alors qu’il était au sol, et cela à 20 centimètres du visage. Il se trouve qu’une vidéo a pu être tournée durant cette charge policière, les propos tenus par les policiers n’étaient pas absents. De plus, lorsqu’un voisin se rendait au commissariat pour prendre des nouvelles des deux « délinquants », il lui était répondu rudement : « Je ne te parle pas à toi, je ne parle pas le marocain ! » Il se trouve que cette personne, ingénieur de profession, est de nationalité roumaine (avec l’accent nécessairement), elle est de couleur blanche et parle couramment le français. Côté IGS, il ne semble pas qu’une enquête ait été ouverte. (Source, Rue 89, 16 et 17 février 2010)

De profondis

Ce 18 février, nous apprenons le décès de Robert Pandraud, ancien ministre de la sécurité, aux côtés de Charles Pasqua, de 1986 à 1988. Au soir de la mort de l’étudiant marocain Malik Oussekine, le 7 décembre 1986, rue Monsieur-le-Prince, dans le 6è arrondissement de Paris, il avait eu ce commentaire laconique : « Si j’avais un fils sous dialyse, je lui interdirait de faire le con, la nuit, dans la rue ! » Un humaniste policier, comme on les aime… (Source, France Inter, 18 février 2010)

Police versus justice

Comme ils en ont pris la triste habitude depuis la campagne des élections présidentielles d’avril 2002, les syndicats de policiers s’en prennent de nouveau aux magistrats. C’est ainsi que le syndicat Synergie-Officiers et le syndicat Alliance des policiers en tenus (tous deux de droite dure) emboîtent le pas à la hiérarchie policière du Val-de-Marne. Le 19 février, ils ont pris pour cible le juge des libertés et de la détention du tribunal correctionnel de Créteil, lui reprochant de refuser de prolonger les gardes à vue pour les trafics de stupéfiant. Ce qui obligerait les enquêteurs de « travailler sur 48 heures, sans aucun temps de repos. » Tout en accusant certains magistrats d’œuvrer « contre tout ce que représente l’Etat de droit. » De son côté, le syndicat national des officiers de police (SNOP), réputé être « de gauche », s’en prenait à la justice en des termes très vifs : « La sécurité, dans les départements franciliens, ne peut être prise en otage par un exercice aléatoire de la justice… » Esprit de corps, comme il va de soit. Par ailleurs, l’Union syndicale des magistrats (pas spécialement de gauche), dénonce « une atteinte inacceptable à l’autorité judiciaire…qui vise à jeter le discrédit sur l’ensemble de la magistrature. » (Source, Libération, 20 février 2010)

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