quefaitlapolicelogo QUE FAIT LA POLICE ? – Chronique anti-autoritaire de Maurice Rajsfus – 1 mars 2013


Etat de siège ?
Lorsqu’on déambule dans certains quartiers de Paris, le sentiment est fort de vivre dans une ville assiégée. Pour ne prendre, par exemple, que le quartier du Forum des Halles, le passant ou le touriste peut légitimement s’inquiéter. Pourquoi cette abondance d’uniformes bleus, alors qu’il ne se passe rien ? Pourquoi, à l’occasion, ces policiers déguisés en crustacés ? Pourquoi, en sous-sol, dans l’échangeur du RER Châtelet-les-Halles, cette horde quasi permanente de bravaches du Groupe de protection et de sécurité du réseau (GPSR), armés, guettant les possibles fraudeurs aux portillons, en compagnie de contrôleurs de la RATP – dont c’est le métier – et en arrière-plan des policiers ou des gendarmes mobiles ? Y-a-t-il véritablement danger de trouble à l’ordre public, en surface comme en sous-sol, ou une volonté d’inspirer la crainte ou de créer l’incident permettant de démontrer que la présence policière est nécessaire en ce lieu. Il en va de même dans les halls de la gare du Nord où les patrouilles de parachutistes paradent, mitraillette en main. Plan Vigipirate oblige ! En quels temps vivons-nous ? Qui serait assez naïf pour croire que les éventuels terroristes pourraient s’aventurer dans de tels pièges sécuritaires trop visibles. En fait, la volonté répressive est plus simple : il s’agit surtout d’interpeller des sans papiers pour gonfler les statistiques du ministère de l’Intérieur. Qui pourrait imaginer qu’ un possible porteur de bombe puisse se risquer dans un de ces lieux sensibles ? Est-ce que le porteur d’une casquette, portée à l’envers, s’avisant à jouer à saute-mouton par-dessus les portillons du métro, peut être suspecté de préparer un attentat ? Les terroristes circulent plutôt en taxi mais les tenants de l’ordre public ne s’arrêtent pas à de tels détails. Pour que l’ordre règne, il convient de faire peur, et les recettes mises au point pas Nicolas Sarkozy et ses successeurs au ministère de l’Intérieur sont toujours de saison.

Qu’en est-il des ripoux de la BAC de Paris ?
Il y aurait eu des dérapages non négligeables au sein de quelques unités de la BAC de Paris, pouvait-on apprendre dans les premiers jours de janvier 2013. Depuis, il n’a plus été question de ces comportements peu compatibles avec la fonction policière. Pourquoi ce silence ? Les faits évoqués seraient-ils si graves ? S’il y a eu enquête de commandement, il serait bon de le faire savoir. Peut-être même pour nous expliquer qu’il s’agissait de rumeurs infondées. Cette discrétion laisse entendre que la déontologie policière, pour le moins, aurait souffert d’un certain nombre de dérives, mais l’omerta régnant à la Grande Maison se serait peut être imposée, pour ne pas troubler l’image de la police. A ce propos, qu’en est-il des sanctions annoncées contre les ripoux avérés de la BAC-Nord de Marseille ? Ce qui est certain, c’est que des reclassements ont été effectués discrètement. Un policier, fonctionnaire assermenté, ne peut pas être tout à fait coupable et il faut être sensible à la difficulté de leur tache. Un peu comme pour ces ecclésiastiques ayant fauté avec les petits garçons ou les petites filles qui leur sont confiés dans les patronages, et qui sont envoyés officier dans d’autres paroisses. Sur ce modèle, la majorité des policiers de la BAC-Nord de Marseille serait désormais en activité dans des unités où leurs exploits récents n’ont pas été exagérément médiatisés. En serait-il de même, très discrètement, des possibles ripoux de la BAC de Paris, qui auraient plus ou moins gravement fauté ?

Un peu d’histoire contemporaine
L’ordre étant une religion à laquelle il ne faut absolument pas déroger, des personnalités tout à fait distinguées, qui se présentaient jusqu’alors comme de grands humanistes, ne tardaient jamais à révéler leur véritable nature dès qu’ils accédaient au ministère de l’Intérieur. Ce fut le cas pour Jean-Pierre Chevènement, grand républicain proclamé, qui montrait du doigt les jeunes des banlieues « sensibles », les qualifiant de « sauvageons ». Dans le même temps, cet allié temporaire des socialistes, en 1997, comparait les policiers aux « hussards de la république », tout en les caressant dans le sens du poil : « Vous êtes les meilleurs remparts de la démocratie ! » Le ministre de l’Intérieur, choisi par Lionel Jospin sera rapidement apprécié par les hommes d’ordre dont il assurait la tutelle, y compris par le syndicat de droite des policiers en tenue, Alliance, qui, en juillet 1997, se félicitait de ce que « la mention de l’origine raciale et ethnique ne constitue plus, désormais, un délit. » Commentaire intervenant suite aux palinodies du ministre face à un fichier de la préfecture de police de Paris que ce grand républicain aura les plus grandes difficultés à enterrer. Par ailleurs, il ne faut surtout pas négliger le fait que, lorsque le 7 octobre 1997, les adhérents du syndicat national des policiers en tenue (SNPT) font acte de repentance pour les crimes de leurs anciens, lors de la chasse aux Juifs, de 1941 à 1944, Jean-Pierre Chevènement leur demandait de pas « sombrer dans le masochisme ». Tel que.
Rapidement, le ministre de l’Intérieur, qui regarde de près le modèle US, estime nécessaire d’user de la répression « contre les incivilités ». Dans le même temps, il ne juge pas utile de remplacer le préfet de police, Philippe Massoni, homme-lige de Charles Pasqua, en poste depuis 1993. Le grand œuvre de Jean-Pierre Chevènement sera le colloque de Villepinte, en octobre 1997. Cette rencontre de type sécuritaire, a surtout pour objectif de faire reculer « la petite délinquance ». C’est l’époque où le ministre de l’Intérieur tient à rappeler que « la sécurité est une valeur de gauche ». Le 19 janvier 1999, à l’Assemblée nationale, la cible este la même : « La délinquance des mineurs représente un quart de la délinquance totale. » Ce qui ne manquera pas de lui attirer une leçon de morale républicaine, dans Le Monde, quelques jours plus tard : « Rien n’est plus dangereux pour la République que de faire de la sécurité un enjeu idéologique et électoral…Il serait temps que M. Jospin le rappelle à son ministre de l’Intérieur. »
Dès les premières semaines de cette même année 1999, Jean-Pierre Chevènement émettra l’ambition d’étudier un système de pré-recrutement pour que les jeunes maghrébins, africains ou d’origine asiatique puissent bénéficier d’une remise à niveau pour passer les concours d’entrée dans les écoles de police. Il s’agissait, en fait, de copier le modèle institué par le maire de New-York : des policiers noirs à Harlem, et d’autres, d’origine asiatique, à China Town. Ce qui, sur le plan social, en France, ne manquerait pas de créer des sources de conflits supplémentaires dans des banlieues déjà en but à la vindicte policière. C’est l’époque où, selon un sondage publié par Libération, seulement 38% des personnes interrogées, classent encore à gauche de ministre de l’Intérieur choisi par Lionel Jospin, avec ce commentaire d’un sympathisant socialiste sondé : « …Il traite les jeunes de voyous, veut les envoyer dans des maisons de correction. Ca ne me plait pas ! »
Dès son arrivée au ministère de l’Intérieur, en mai 1997, Jean-Pierre Chevènement avait tenu à affirmer : « La France a toujours une tradition latine de police d’ordre ! » Ce qui signifiait clairement que, sous sa direction, les cerbères de la République pourraient continuer à se comporter avec leur brutalité habituelle. Cela sans véritablement s’inquiéter du Code de déontologie édicté par Pierre Joxe, en mars 1986. En août 2000, Jean-Pierre Chevènement démissionnait. En cette occasion, Le Monde rappelait que, jeune étudiant à Sciences-Po, le futur ministre de l’Intérieur avait flirté, un temps, avec le club Patrie et Progrès, s’intéressant à « la voie médiane entre un socialisme patriotique et une révolution nationale permettant à la République de survivre à De Gaulle. » Il est vrai que Chevènement, lui aussi, s’est toujours fait une certaine idée de la France…

Alerte au gaz
Le 12 février, les ouvriers de l’usine Goodyear d’Amiens, menacés de licenciement collectif, manifestaient près du siège social de leur société, à Rueil-Malmaison, en compagnie de délégations solidaires d’autres entreprises se trouvant dans la même situation. Pour protéger les bureaux de Goodyear, la préfecture de police de Paris avait envoyé rien moins que soixante dix fourgons de CRS. Des incidents devaient donc inévitablement se produire mais à armes inégales : gaz lacrymogène contre jets d’œufs et de peinture jaune. Bien évidemment, force devait rester à la loi, comme on dit, c’est-à-dire avec la violence « nécessaire » pour maintenir l’ordre. Il est vrai que, dans les écoles de police, nos policiers n’ont pas été éduqués pour s’inquiéter du sort des ouvriers.

Feu à volonté !
Cela n’arrive pas tous les jours. C’est heureux. Le 14 février, à Marseille, un policier qui n’était pas de service, n’en déambulait pas moins avec son arme de service sous sa veste. Se prenant de querelle avec un garçon âgé de 19 ans, dans une épicerie nocturne, il n’hésitait pas à sortir son arme pour tirer sur sa victime, qui devait décéder en arrivant à l’hôpital. Cet excellent serviteur de l’Etat, pris de boisson cette nuit-là, va-t-il expliquer, durant sa garde à vue, qu’il était en état de légitime défense ? Peu crédible, évidemment. Il est bien entendu, généralement, que le fonctionnaire d’autorité n’est pas un cow-boy mais nul n’a dû apprendre, à celui-là, lorsqu’il faisait ses études en école de police, comment ne pas se servir de son arme.

En odeur de sainteté
Notre ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, n’oublie jamais que, par tradition « républicaine », il exerce également la tutelle des religions. Sans doute pour faire respecter la loi de 1905 sur la séparation des églises et de l’Etat. Curieusement, notre protecteur de l’ordre public s’est déclaré « consterné », et même empli de « tristesse », après la démonstration, le 12 février, des Femens ukrainiennes, à Notre-Dame-de-Paris, suite à la démission du pape Benoît XVI. Lequel n’était pas particulièrement « progressiste ». Après cette séance blasphématoire, durant laquelle les Femens devaient proclamer : « Pope, no more ! » Peut-être sera-t-il nécessaire de resacraliser la cathédrale, avec Manuel Valls au premier rang des spectateurs attentivement concernés.

Convivialité policière
Comment pourrait-on prétendre que nos policiers ne sont pas attentifs aux difficultés sociales de leurs concitoyens ? Ainsi, le 17 février, à Nantes, inquiétés de voir un père installé en haut d’une grue pour protester contre l’interdiction du droit de visite à son fils, des passants décident de lui faire parvenir des vivres pour lui permettre de mener son combat. Que font alors nos policiers, de service dans ce secteur ? Ils se ruent sur les auteurs de ce geste convivial pour leur arracher les quelques vivres destinés à ce contestataire. Motif invoqué : le panier de nourriture aurait pu contenir des explosifs. Les images transmises par Canal + étaient particulièrement significatives. Il est vrai qu’une heure plus tard, bien conscient de cette maladresse, nos braves policiers faisaient parvenir des boissons à cet homme, auteur d’un désordre public inadmissible. Du haut de la grue, dénonçant la présence policière, l’homme lançait : « Je ne suis pas en grève de la faim, je suis affamé par ces messieurs en bleu, en bas. »

Au secours, c’est la police !
La tribu policière de Marseille aura tout connu ces derniers mois. Le 14 février, un gradé local se confiait : « Je crois que rien ne nous sera épargné ! » En effet, après les graves blessures infligées à une passante, renversée sur un trottoir par un policier ivre, au volant de son véhicule, Libération revenait sur la mort de ce jeune homme, tué dans la nuit du 13 au 14 février par un policier qui n’était pas de service. Mis en examen, ce policier qui était en « état alcoolisé », lors des faits, ne peut pas être « Sali » sans être accompagné dans le « déshonneur ». C’est ainsi que, rapidement, le directeur départemental de la sécurité publique précisait que la victime était « bien connue des services de police ». Tout comme les policiers de la BAC-Nord, sans doute…

Ecarts de langage
Le 29 janvier 2013, dans le cadre de l’affaire Karachi, qui devait coûter la vie à une dizaine d’ingénieurs français, des policiers de la Division nationale des investigations financières et fiscales perquisitionnaient la villa de François Léotard, ancien ministre de la Défense. Le Monde, daté du 14 février, relatait la qualité de l’accueil réservé aux fins limiers : « Vous me faites chier ! » puis s’adressant à son épouse, et désignant les policiers, il l’interrogeait : « La Stasi est partie ? » Lors d’une précédente perquisition, le 20 novembre 2012, les cinq policiers et gendarmes missionnés avaient déjà dénoncé des « propos désobligeants, voire injurieux et outrecuidants », tenus à leur endroit. D’après le procès-verbal de ces enquêteurs, François Léotard aurait éructé : « …Vous me faites chier…Je n’ai rein à vous dire. Je ne veux pas vous parler ! Quel est le juge qui vous envoie ? De toute façon, je l’emmerde ! Entrez, bande de connards ! » Charmant citoyen, soucieux d’aider les autorités de son pays. Et dire que cet ancien homme politique de premier plan, a été également ministre de la Culture. Désormais, il se trouve lesté d’une plainte ouverte par le parquet de Draguignan.

Mœurs policières
Le 18 février, sur France-Inter, un chauffeur de taxi parisien relatait quelques souvenirs professionnels. Entre autres, ce jour où il devait « charger » un client vêtu simplement d’un jean et d’un t-shirt. . Au passage d’un feu vert, le taxi est doublé à très grande vitesse par deux véhicules banalisés, et il est heurté par le second. Aussitôt, un policier se trouvant à bord de l’une des voitures lui faisait signe de s’arrêter, avant de lui reprocher d’avoir « grillé » un feu rouge. Protestation du chauffeur de taxi, avec le soutien du passager. Dès lors, le policier change de victime et insulte bassement le client qui, ne baissant pas pavillon, se voit gratifier d’un charmant : « Ta gueule ! » et autres gentillesses. Comme le pékin insiste, le policier plastronne : « Moi, je suis assermenté, alors vous dire n’importe quoi… » Ce à quoi le passager répond : « Moi aussi ! », en exhibant sa carte de procureur. Comme quoi, commentait le chauffeur de taxi, l’habit ne fait pas le moine, avant de conclure : « Cet excellent policier n’a pas insisté… »

Police et population
Le 22 février, à Bobigny (93), le quotidien Libération organisait une série de débats sur l’avenir de la région Ile-de-France. Parmi les thèmes traités, il y avait : « Comment réconcilier la police et les quartiers populaires ? » Grave question. Particulièrement dans ce département, dit « sensible » de la Seine-Saint-Denis, où la police est tellement câline avec les jeunes. Parmi les débatteurs, il y avait Daniel Vaillant, ancien ministre de l’Intérieur socialiste qui, en juillet 20002, pleurait des larmes de sang en expliquant que son successeur, Nicolas Sarkozy, lui avait volé son programme.

Ah bon !
La Direction générale de la police nationale (DGPN) prévoit la mise en place prochaine de contrôles inopinés d’usage d’alcool et de stupéfiants, au sein des services. Cette information diffusée en interne le 20 février, est tout à fait étonnante. Cette mesure devrait servir à lutter contre les suicides dans les rangs de la police. Outre le fait que le stress peut être à ‘origine de nombre de suicides, il est impossible de négliger le fait que trop de policiers se servent de temps à autres dans les scellés contenant des produits illicites. Pour certains syndicats de policiers, qui dénoncent une « stigmatisation » intolérable, il s’agit d’une volonté répressive sans fondement.

Course-poursuite mortelle
Il parait que les policiers ne sont plus autorisés à se lancer dans des courses-poursuites contre les « individus » qu’ils suspectent. Ce ne serait qu’une information approximative. En effet, à l’aube du 21 février, vers 6 heures du matin, des policiers de la BAC qui patrouillaient, en fin de service, sur le boulevard périphérique, apercevaient un véhicule 4X4 qui se livrait à des « incivilités » à la hauteur de la porte Maillot. D’où, immédiatement, une course-poursuite qui s’engageait à une vitesse avoisinant parfois les 160 kilomètres à l’heure – selon le syndicat UNSA-Police. Faute de pouvoir rattraper le chauffard, les policiers appellent leurs collègues à la rescousse. Lesquels entrent à leur tour sur le périphérique entre la porte de Clignancourt et la porte de La Chapelle, mais à vitesse réduite. D’où un choc épouvantable, le véhicule de la BAC étant percuté par celui d’homme pris de boisson qui, à ce moment, circule à plus de 150 km/h. Résultat des courses : deux policiers tués sur le coup et un troisième grièvement blessé.
Question : le ministre de l’Intérieur va-t-il se décider à interdire officiellement cette pratique des courses-poursuites qui, régulièrement, ne cesse de faire des victimes ? Déjà, lorsque sans raison, il est possible de voir des véhicules de police traverser les quartiers à vive allure, sirène hurlante, pour regagner leur commissariat, il est prudent de ne pas se trouver au bord du trottoir.

Gesticulations nationales
La mort violente d’un être humain constitue toujours un drame. Qu’il s’agisse d’un policier ou d’un simple salarié, bien évidemment. Pourtant, on ne cherche jamais à trop émouvoir la France profonde lorsqu’un ouvrier maçon, victime d’un patron peu soucieux de la protection de son personnel, trouve la mort en tombant d’un échafaudage conçu de façon économique. De la même façon, on ne se soucie pas vraiment des tourments éprouvés par un allocataire qui s’immole par le feu devant une agence de Pôle-Emploi, cet organisme infernal destiné à désespérer les chômeurs.
L’approche compassionnelle est bien plus différente lorsqu’il s’agit de policiers dont on cherche à nous convaincre qu’ils ont été victimes du devoir alors que, bien souvent, ils ne font qu’ajouter la punition à la sanction. Comme s’ils étaient à la fois gardiens de l’ordre public et justiciers. Le 26 février, des obsèques quasi-nationales étaient organisées après le décès des deux policiers de la BAC de nuit de Paris, sur le boulevard périphérique, avec un cérémonial tout à fait inhabituel. Il y avait la volonté de chauffer les esprits, tout en confortant l’institution policière. C’est ainsi que, dans la cour de la préfecture de police de Paris, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, s’adressait aux nombreux policiers : « Ceux qui s’attaquent à vous s’attaquent à l’Etats ! » Rien que cela ! Présent à ses côtés, le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls ne pouvait qu’apprécier.
Suite à cette cérémonie funèbre, des milliers de policiers devaient se rassembler pour une marche silencieuse entre la porte Maillot, où avait débuté la traque du chauffard, et le siège de la BAC de nuit de Paris, situé boulevard Bessières. Au cours de cette manifestation, il était possible d’entendre des propos, destinés aux journalistes, tels que : « On a l’impression que les magistrats sont là pour saboter notre boulot !» Du Sarkozy pur jus. Ou encore : « Nous, on ne fait pas de politique, on arrête des délinquants. On n’est pas là pour interpréter le Code pénal. » Plus grave, peut-être, ce propos relevé dans Métro : « Nous on ne verra plus nos collègues, et leurs enfants non plus. Alors que le chauffard, lui, est encore en vie ! » Véritable appel au rétablissement de la peine de mort. Pour terminer, lors de la dispersion de ce cortège, un policier qui demandait une minute de silence en mémoire de ses deux collègues, évoquait : »nos deux camarades sauvagement assassiné ! » A ce stade, nous sommes déjà bien loin de cette marche silencieuse de policiers exaspérés. Certes, les chiffres n’expliquent pas tout et Le Parisien du 27 février rappelait le nombre de policiers tués en mission ces trente dernières années : 233 de 1980 à 1989 ; 186 de 1990 à 1999 ; 57 de 2000 à 2009. Malgré la diminution des morts policiers, c’est toujours trop, mais de grâce, il serait temps de cesser de chauffer les esprits. Comme si Manuel Valls et ses collègues socialistes voulaient nous démontrer qu’ils sont tout aussi attentifs au « mal-être policier » que Nicolas Sarkozy et Claude Guéant.

Feu à volonté !
Le 26 février, à Carcassonne, un policier ouvrait le feu sur une voiture. Il n’était nullement en situation de légitime défense. Cet excellent défenseur de l’ordre public était persuadé qu’à bord du véhicule qu’il jugeait suspect se trouvait un prisonnier en fuite. En fait, la jeune femme qui était au volant a dû éprouver la peur de sa vie, relatait France Inter, le 27 février. L’auteur des huit coups de feu – un policer de la BAC – expliquera qu’il s’était trompé de voiture. L’information diffusée ne nous révèlera pas si ce policier, friand de la gâchette, s’est excusé, et sa hiérarchie également. Il est évident que les bonnes manières de Manuel Valls envers la police, qui serait ma aimée d’une partie de la population, ne peut que renforcer la certitude de nos anges-gardiens que nous sommes tous des suspects en puissance dont il convient de se méfier. Question : y-aura-t-il des sanctions prises contre ce type d’excès de zèle ?

Vient de Paraître
Un livre, entièrement consacré aux exploits crapuleux de la Bac-Nord de Marseille, révélés en 2012, nous permet de réaliser que la réalité peut dépasser la fiction dans certaines unités de nos forces de l’ordre. Cet ouvrage de Frédéric Ploquin vient à point nommé pour nous montrer qu’i n’y a pas que des héros au sein des BAC. Cet ouvrage, rédigé au terme d’une longue enquête, nous permet de comprendre la nature d’un certain nombre de comportements délictueux, longtemps impunis. CE que l’on pourrait qualifier de petit gangstérisme ou de gangrène, qui ne serait pas une exclusivité de la BAC-Nord de Marseille. (Vol au-dessus d’un nid de ripoux, de Fédéric Ploquin, Fayard, Février 2013)

A la PAF comme la BAC ?
On ne devient pas toujours policier par vocation. Rarement même. La sécurité de l’emploi, ajoutée au salaire, supérieures pour les nouvelles recrues à celui d’un enseignant débutant, ne sont pas étrangères à cet engouement pour la fonction policière que l’on connait depuis plusieurs années. Certes, il faut posséder le baccalauréat pour concourir à l’entrée dans une école de police, mais les candidats n’en sont pas moins nombreux – et l’on refuse du monde. A ce niveau de recrutement, il devrait être possible d’envisager une délinquance zéro chez nos gardiens de l’ordre public. Il sembler que ce ne soit pas le cas. Fort heureusement, il n’y a qu’une minorité de ripoux en poste dans les commissariats. Il ne se passe pourtant pas de jour sans que nous soyons informés de dérives policières les plus diverses, les plus minables, les plus immondes même.
Derniers exploits, ceux de deux policiers de la PAF (Police aux frontières), en poste à Lille. L’un âgé de 36 ans, l’autre de 24 ans, qui ont été mise en examen, puis écroués, le 1er mars dernier. Depuis près d’un an, ces excellents gardiens de l’ordre public, sous prétexte de contrôles d’identité rackettaient des immigrés, originaires du Bengladesh. Ces parias, en attente d’une possible régularisation, mais n’ayant pas le droit de travailler, vendaient à la sauvette des roses, le soir, aux clients des restaurants lillois. Nos braves policiers de la PAF ne se contentaient pas de leur prélever des sommes allant jusqu’à 250 euros, se permettant même de perquisitionner à leur pauvre domicile et de jeter les fleurs. Ces ripoux minables giflaient également leurs victimes et, pour parfaire leurs exactions, ils les emmenaient loin de Lille, avant de les relâcher dans la nature. Pour le procureur de la République de Lille, il s’agirait « d’actes isolés » de policiers exerçant dans un service par ailleurs « exemplaire ». Ah bon ! Nous voilà rassurés.

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