quefaitlapolicelogo QUE FAIT LA POLICE ? – Bulletin d’information anti-autoritaire – Nouvelle série – Numéro 10 – Mai 2007

Editorial : Répression à la carte…

Quel que soit le candidat dont le nom sortira des urnes, le 6 mai 2007, une certitude : l’importance du rôle de la police n’a été remise en cause par aucun des favoris à l’élection présidentielle. Nous savons, d’expérience, qu’à chaque victoire de la droite, les lois sécuritaires sont durcies, tout comme sont plus menacés les sans papiers. Comme si la République ne pouvait être sauvée qu’au prix d’un tour de vis supplémentaire. Nous savons également que lorsque la gauche est de retour au pouvoir, les lois scélérates de la droite ne sont pas abrogées. C’est ainsi que les lois Pasqua de 1986 ont été, malgré les promesses électorales, conservées par la gauche entre 1988 et 1993 – particulièrement en ce qui concerne les immigrés sans papiers. C’est ainsi que, de 1997 à 2002, les lois Pasqua et Debré ont été non seulement maintenues par le gouvernement Jospin mais qu’elles ont été parfois durcies par les ministres de l’Intérieur Chevènement et Vaillant.

On nous fera remarquer qu’il ne faut pas préjuger de l’avenir mais comme les candidats ne se sont guère prononcés sur ce sujet, il convient d’être inquiet, sinon circonspect. Ce qui est sûr, c’est que certains sont plus répressifs que d’autres,et ils ne cachent pas leur volonté de mettre au pas une société qui serait réticente à leurs projets. En face, ceux qui affirment vouloir rétablir un climat plus démocratique, doivent être assurés que nous ne manquerons pas de surveiller leurs pratiques – au-delà du rétablissement d’une police qui n’aurait de proximité que le nom.

Les uns et les autres sont des fidèles de la religion de l’ordre. Pour les plus durs, l’ordre et la morale sont associés, ce qui peut nous conduire à un Etat autoritaire, où le droit de se taire primerait sur la possibilité de s’exprimer. Pour d’autres, l’approche est plus pudique, mais il est indispensable de savoir ce qui se cache sous la promesse d’un ordre juste.

Maurice Rajsfus

A l’école de la République

Le 20 mars, dans le XIXème arrondissement de Paris, un parent d’élève, d’origine asiatique, est interpellé à la sortie de l’école primaire de la rue Rampal, où il est venu chercher son fils. Apparemment, les policiers sont en mission pour faire du chiffre. Face à la protestation des parents d’élèves, qui tentent de s’opposer à cette arrestation, les policiers s’énervent et font usage de gaz lacrymogènes et de leurs matraques. Déjà, le 19 mars, en fin d’après-midi, une femme africaine avait été interpellée devant cette école. Ce même jour, à la sortie de l’école maternelle de la rue Rampal, une vieille dame chinoise était interpellée, avec une petite fille qu’elle était venue chercher. Comment oublier -sans faire d’amalgame- que sur les murs des écoles de ce quartier figurent des plaques rappelant les rafles dont les enfants juifs scolarisés dans ces mêmes écoles, avaient été victimes le 16 juillet 1942. (Sources, Libération, 21 mars 2007 et témoins)

Qu’en est-il des libertés fondamentales ?

Ces opérations de police, dans le XIXème arrondissement de Paris, ne sont que la partie visible des rafles anti-immigrés auxquelles il n’est pas possible de s’habituer. Ce qui a conduit le Réseau Education sans frontières (RESF) à publier, le 21 mars, un communiqué de presse dont nous donnons ici la forte conclusion : « …Non contents d’augmenter la cadence des contrôles au faciès, parfois en dehors de tout cadre judiciaire, les fonctionnaires de police ont donc choisi cette fois de violer le dernier refuge des valeurs fondamentales de la République, à savoir l’école. Le préfet de police de Paris aurait tort de sous-estimer la colère grandissante que provoquent ces procédés iniques et circonstantiels dans les quartiers dits « populaires ». La peur cède peu à peu à la détermination d’y mettre fin, on l’a vu ce soir. Nous partageons cette détermination. Le procédé de rafle est en lui même odieux parce qu’il bafoue l’ensemble des droits fondamentaux des personnes humaines. Et doublement insupportable quand les institutions de la République sont elles-même visées. Nous rappelons aussi les garanties données à RESF à deux reprises pendant l’été 2006 (Le 5 et le 27 juillet) par la Préfecture de police : qu’il n’y aurait pas d’interpellations dans et aux abords des établissements scolaires. Désormais, devons-nous tenir pour caducs ces engagements ? (Par Internet, 21 mars 2007)

Avec la colère, il reste l’humour noir…

Ces descentes de police devant les écoles n’ont pas laissé indifférents ceux pour qui l’humour reste la dernière défense face à la répression. Voici le texte diffusé sur un site où l’on estime que la résistance à l’infamie passe également par la dérision :

« Lundi 19 mars, en fin de journée, la police s’est vaillamment attaquée à la plus grave menace à laquelle est confrontée notre patrie (juste devant Al-Quaida, le réchauffement climatique et le fondamentalisme centriste) : les petits enfants basanés qui squattent les cantines de nos écoles. Plutôt que de matraquer nos chères petites têtes brunes, les forces de l’ordre ont agi avec subtilité et ont attaqué le mal à sa racine : leurs parents qui les hébergent illégalement.

C’est ainsi que plusieurs interventions ont eu lieu devant une école maternelle du quartier parisien de Belleville, à l’heure de la sortie. Malgré l’attitude hostile de la foule, qui les menaçaient avec des poussettes chargées jusqu’à la gueule de bambins bruyants, les policiers ont agi avec sans froid en aspergeant les contestataires de gaz lacrymogènes, avant d’embarquer une mère de famille à l’aspect menaçant. Malheureusement, submergés par une marée menaçante de jeunes mamans, les fonctionnaires de police ont dû relâcher cette femme. Grand bien leur en a pris, puisqu’ils ont subséquemment localisé, assiégé et finalement interpellé, un individu bien plus dangereux : un papy qui attendait dans un café du quartier que ses deux petits enfants sortent de leurs écoles respectives.

L’individu a par la suite été emmené dans un commissariat du IIème arrondissement, où l’on suppose que son identité française a été vérifiée selon les procédures en vigueur, c’est à dire la lecture à bout portant d’un annuaire des PTT… Nicolas Sarkozy aura réussi, à quelques jours de son départ de la place Beauvau, à enfin éradiquer les dernières zones de non-droit qui subsistaient en France : les écoles. » (Ried Melliti, par Internet, 22 mars 2007)

La police à Belleville.(suite)

Après les descentes dans les écoles de Belleville, les 19 et 20 mars, les forces de l’ordre n’ont rien trouvé de mieux que de placer en garde à vue la directrice d’une école maternelle, le 23 mars, à 9 heures. Laquelle avait répondu à une simple convocation du commissariat de police du XIXème arrondissement de Paris, en pensant qu’on lui demandait de témoigner sur les incidents des jours précédents. Pas si évident. Cette citoyenne honorable s’est retrouvée en garde à vue durant plus de cinq heures pour « outrage et dégradation de biens publics, en réunion ». Il lui était reproché d’avoir « tapé sur une voiture de police ». Conscient malgré tout de l’incongruité de cette mise en garde à vue, le parquet ordonnait la remise en liberté de cette enseignante dans l’après midi du 23 mars.

Ce dérapage policier n’a pas manqué de provoquer de nombreuses protestations. Ainsi cette réaction de Dominique Voynet : « C’est à l’un des derniers refuges des valeurs de la République – l’école – que le ministre candidat de l’UMP s’est attaqué. » Cette levée de boucliers n’a pas ému Nicolas Sarkozy qui, depuis la Guadeloupe, a estimé « qu’il n’y a vraiment pas de quoi faire une polémique. » Dans la foulée, le ministre de l’Intérieur recevait immédiatement le soutien de son chargé de mission, Arno Klarsfeld, qui en rajoutait une louche en expliquant que « l’asiatique interpellé était soupçonné dans une affaire de trafic d’armes »; tout en s’indignant de l’utilisation du mot « rafle » et de la comparaison avec la police de Vichy. Outre la directrice de l’école maternelle, les deux hommes qui avaient été arrêtés pour « incitation à l’émeute » étaient également remis en liberté. De son côté, l’avocat de la directrice d’école à fait savoir que les interpellations à la sortie des écoles représentent un franchissement de ligne jaune. Cela ne pouvant que susciter l’indignation.

Rapidement, un peu gêné par ces actions intempestives de la police, le ministère de l’Intérieur n’a pas hésité à botter en touche en affirmant que le placement en garde à vue de la directrice relevait d’une « décision de justice », prise par un « procureur indépendant ». Il se trouve pourtant que les contrôles d’identité menés à Belleville, les 19 et 20 mars ne relevait absolument pas d’une réquisition précise du parquet. Finalement, dans la soirée du 23 mars, le cabinet du ministre de l’Intérieur renouvelait ses instructions aux préfets, datées du 14 septembre 2006, et appelait, par télégramme, dans l’urgence, « Ã  nouveau leur attention sur le fait que l’exécution des mesures d’éloignement… ne doit en aucun cas donner lieu à des interpellations dans l’enceinte ou à proximité d’un établissement scolaire« .

Il convient de noter qu’au plus fort de l’intervention policière, le 19 mars, la directrice de l’école maternelle avait ouvert les portes de son établissement pour protéger parents et enfants des jets de gaz lacrymogènes généreusement dispensés par les policiers. Comme les forces de l’ordre n’apprécient guère que l’on puisse s’indigner de leurs exactions, plusieurs parents d’élèves qui souhaitaient porter plainte auprès du commissariat du XIXème arrondissement se sont vus renvoyer vers l’Inspection générale des services, IGS. (Sources, Libération 24 mars et Le Monde 26 mars 2007)

Forte pensée

Lu sur un mur de l’université de Nanterre : « La France répressive, aimez-là ou combattez-là ! »

Lille : les brutes de la PAF à l’ouvrage

Tout au long de la campagne électorale, la répression contre les « colorés » n’a jamais faibli. Il n’est pas forcément question, ici, des sans papiers mais banalement du harcèlement au quotidien de ceux qui n’ont pas le teint suffisamment blanc au gré de nos policiers. Il n’est d’ailleurs pas rare que des Antillais, Guyannais, Réunionnais, tous citoyens français soient l’objet de cette traque déclenchée contre ceux dont on peut estimer qu’ils ne sont pas d’ici… Voici un cas d’école.

Le 15 mars, à Lille, vers 10 heures, six étudiants, français et guinéens, sont interpellés par des policiers de la PAF devant la gare de Lille-Flandre. Un des étudiants guinéens qui n’a pas ses papiers sur lui est immédiatement mis à l’écart, tandis qu’une étudiante française, également dépourvue de papiers, n’est pas inquiétée. Le jeune guinéen ne peut produire que sa carte de crédit et sa carte vitale. Il est immédiatement menotté dans le dos et, comme il proteste, les policiers deviennent brutaux. Témoignage de la victime : « L’un m’a étranglé, les deux autres m’ont mis les bras en arrière. J’ai crié à un ami, dans ma langue, de prendre des photos. » Dans le fourgon qui conduit le jeune homme au commissariat, il reçoit des coups de coude au visage et dans le cou. Arrivé au siège de la PAF de Lille, il est violemment tiré hors de la voiture et tombe au sol. Dans la soirée un médecin prescrit dix jours d’arrêt de travail à l’étudiant. Peu importe, la garde-à-vue se poursuit, « pour rébellion » affirment les policiers.

Un peu inquiets de leur exploit, pourtant, les hommes de la PAF sont plus coulants avec les amis de l’étudiant qui sont venus apporter les papiers de leur camarade. Ils proposent même la fin de la garde-à-vue en échange des images de l’interpellation qui ont été filmées. Les traces de ce type d’opérations sont toujours gênantes pour les défenseurs de l’ordre public. En cellule, l’étudiant guinéen crie et pleure car son moral est au plus bas. Les policiers, très courtois, lui disent : « Ferme ta gueule… Si tu n’arrêtes pas, tu auras une sanction ! » Ensuite, c’est de nouveau,le châtiment corporel : « Cinq ou six policiers sont venus avec des gants et m’ont frappé à coups de pieds. Je me suis effondré… Maintenant, il y a toujours la douleur. J’ai mal au dos et à l’intérieur… » Les traces des chaussures des policiers sont toujours visibles (photo à l’appui) sur le teeshirt de la victime, qui a déposé plainte contre ces policiers, avec constitution de partie civile. (D’après Libération, 21 mars 2007)

Humanisme policier ?

Le 22 mars, le bulletin d’information de RTL nous révélait le contenu de deux notes de service adressées aux CRS. Il était fait appel à ce corps de policiers en leur demandant de se faire discret en banlieue,avant le premier tour des élections présidentielles. Il n’en reste pas moins que la Direction de la police nationale a nié rapidement qu’une telle consigne a pu être donnée. Les syndicats de policiers n’ont pas manqué d’appuyer leur hiérarchie, tout en ajoutant que ces deux notes ne représentaient que des « initiatives individuelles et malheureuses ». Ces deux réactions ne font que confirmer l’attachement de nos policiers aux grands principes de la France républicaine et démocratique. (D’après Matin-Plus, 23 mars 2007)

Futur postérieur

Son départ était attendu. Le 21 mars, Nicolas Sarkozy annonçait qu’il allait quitter la place Beauvau le 26 mars. Il y sera remplacé par François Baroin, que l’on peut déjà qualifier de futur ex-ministre de l’Intérieur. C’est le même ex-ministre des DOM-TOM qui, en 2006, au plus fort de l’épidémie de chikungunya, se trouvait à la Réunion. S’étant vu reprocher le manque d’implication de la métropole dans cette catastrophe sanitaire, le petit ministre n’avait su que répondre : « Je ne suis pas médecin ! » Belle réplique de ce fidèle de Jacques Chirac. (Sources, Libération, 22 mars et Le Monde, 23 mars 2007)

Des brutes pas trop coupables

Le 7 mai 2003, au petit matin, à Saint-Denis (93) quatre policiers de la BAC procédaient à l’interpellation d’un automobiliste, au pied de son immeuble. L’homme a un peu bu, et le contrôle révèle 1,15 gr. d’alcool dans le sang. L’interpellation est brutale car l’homme ne se laisse pas faire. Sans doute aussi parce que ce vigile de nuit, âgé de 35 ans, se prénomme Hakim et que cela se voit peut-être sur son visage. Il semble que les hommes de la BAC n’ont pas été très caressants puisque les médecins vont prescrire 46 jours d’ITT. De fait, le tabassage a été impressionnant : traumatisme crano-facial, hématome au thorax et à l’abdomen résultant d’un coup donné avec un instrument contondant, fracture orbitale, lésion à un coude. C’est ce que l’on pouvait apprendre lors du procès de ces brutes, le 23 mars 2007, devant le tribunal correctionnel de Bobigny.

Les policiers accusés, suite à une très longue enquête, après le dépôt de plainte de la victime, expliquent : « On a eu énormément de mal à le maîtriser, il était déchaîné… » Le témoignage de Hakim est évidemment très différent : « Ils m’ont fait un balayage et donné en même temps un coup de matraque à la tête. Après, c’était comme une pluie de coups qui tombait sur moi. » Menottée, la victime n’en continue pas moins à être « contrôlée ». Pourtant, comme Hakim bouge trop au gré des policiers, c’est ensuite le « pliage » qui lui est imposé : la tête sur les genoux. Une de ses amies témoigne également : « Un des policiers bavait et avait les yeux révulsés », elle ajoute même avoir entendu l’invective de « Sale Bougnoule ! ».

Ne sachant comment se défendre de ces accusations de mauvaises manières, les policiers qui se trouvent dans le boxe des accusés multiplient les éléments d’une défense peu crédible : ils ont été frappés par leur victime qui, de plus, leur crachait dessus. En tout cas, tous affirment n’avoir pas tapé. L’un d’eux affirme même : « Il est tombé lourdement sur la face, il n’a pas eu le réflexe d’amortir sa chute… » Un autre explique, sans rire : « Il s’est frotté le visage, je ne sais pas », pour justifier les contusions à la tête.

La présidente du tribunal s’énerve face à ces explications fantaisistes, et rappelle que, déjà, l’IGS a jugé peu crédibles les déclarations de ces policiers qui, s’ils ont été suspendus quelques mois, en 2003, ont été rapidement réintégrés dans des services administratifs. La présidente du tribunal rappelle également que le commissariat de Saint-Denis a connu un « délitement du sens moral » et qu’entre 2000 et 2005, les violences, les agressions sexuelles, les faux-pas se sont multipliés. Au final, les brutes s’en tireront bien : 5 à 18 mois de prison avec sursis requis par le procureur. Pas de regret pourtant, et l’un des accusés a même murmuré : « S’il s’était laissé faire, on n’en serait pas là ! » (Source, Libération, 24 mars 2007)

Etat de droit. Droit de qui ?

Le Réseau éducation sans frontières a publié le 15 mars un communiqué qui ne laisse aucun doute sur les bonnes intentions des forces de l’ordre face aux militants des droits de l’homme. Au nom du maintien de l’ordre public, c’est aussi bien l’ordre moral que l’ordre politique qui nous est plus en plus imposé :

« Mercredi 14 mars. Une trentaine de membres de RESF, et quatre élus de la mairie de Paris ont été privés de liberté de circulation pendant plusieurs heures, encerclés, bousculés, et même pour deux d’entre eux plaqués à terre par les forces de l’ordre sur le trottoir de la rue d’Arcole.

Mercredi 14 mars, le candidat/ministre de l’Intérieur faisait en guise d’adieu une remise de récompenses à la préfecture de police de Paris. Préfecture fermée pour la matinée. Quartier quadrillé par d’innombrables forces de police.

Les membres de RESF en question n’étaient ni regroupés, ni badgés. Pourquoi, eux, au milieu de la foule habituelle de ce quartier ? Parce que leurs visages sont connus des services de police. Repérés, ils étaient interpellés et rassemblés rue d’Arcole.

L’un d’entre eux, refusant d’obtempérer, a été contraint, mis à terre, menotté, et arrêté pour « rébellion ». Libéré après passage au commissariat, une procédure pour « outrage » sera engagé contre lui. Il risque une condamnation. Le délit de faciès s’étend donc maintenant des immigrés aux militants répertoriés, qui peuvent, sans aucun motif, voir leur banale liberté de circuler à pied dans Paris retirée pendant plusieurs heures par les services de police.

RESF proteste plus qu’énergiquement et entend faire respecter ce droit fondamental de circulation, pour eux comme pour tous. Chasse aux sans papiers qui vivent dans la peur des rafles quotidiennes, chasse aux enfants et aux lycéens sans papiers dès leurs 18 ans, criminalisation des soutiens… Ne nous habituons pas à cela sans réagir ! » (Source, Zpajol par Internet,15 mars 2007)

Comment provoquer une « Ã©meute »

Cela s’est passé à Paris, le 27 mars, dans l’échangeur du RER et du métro, à la gare du Nord. Vers 17H30, des contrôleurs bloquent un voyageur circulant sans titre de transport. Selon certains témoins, il est possible d’entendre des propos racistes au cours de ce contrôle qui aurait été musclé. D’importants renforts de police et de gendarmerie mobile arrivent rapidement. Comme de nombreux jeunes s’indignent de l’intervention policière, les charges se font violentes : matraquage et jets de gaz lacrymogènes dans les sous-sols de la gare. Les violences policières se poursuivent jusque vers 1 heure du matin. Résultat des courses : une dizaine d’interpellations, des magasins saccagés et de nombreux usagers agressés par les forces de l’ordre – les voyageurs au teint basanés étant privilégiés dans la distribution.

Il n’en reste pas moins qu’à côté de quelques « casseurs » de nombreux jeunes scandaient, au plus fort des charges policières : « A bas l’Etat des flics et des patrons ! »

Au lendemain du départ de Nicolas Sarkozy du ministère de l’Intérieur, le sentiment est fort de l’utilisation d’un simple incident (comme il s’en produit fréquemment) pour provoquer une véritable émeute dans le métro parisien. Question : à qui profite cette provocation ? (D’après France Info et images de Canal +, 20 Minutes et Métro)

Gare du Nord : un policier témoigne

« …Je veux apporter le témoignage d’un collègue qui était en poste au quartier général de la préfecture de police de Paris. Il faut que les français sachent que les effectifs présents sur place ont demandé des renforts dès la première minute des incidents, et la compagnie des CRS affectée à la sécurité des gares du Nord et de l’Est a très logiquement été alertée par les officiers de service…avant qu’inexplicablement l’ordre ne soit annulé par le commandement central… La suite on la connaît : cette banale interpellation a dégénéré en incidents sérieux qui ont duré plusieurs heures. Tous les collègues à qui j’en ai parlé se sont d’ailleurs étonnés qu’une interpellation aussi ordinaire se transforme en un événement d’une telle ampleur. On peut être policier et républicain. On peut être policier et démocrate. On peut être policier et craindre pour la démocratie avec M. Sarkozy et ses complices aux affaires. C’est mon cas. Merci de faire passer. Vive la France ! » (Sur Betapolitique, par Internet, 29 mars 2007)

Gare du Nord : les « spécialistes à l’ouvrage

La plupart des médias en ligne ont été rapidement en mesure de publier des photos et films de « l’émeute » de la gare du Nord. On peut y voir notamment l’un de ces « casseurs » des banlieues qui ne serait autre qu’un policier en mission provocatrice. Ce jeune homme, en tenue banalisée, qui s’appliquait à briser les vitrines des magasins à coups de barre de fer a été rapidement repéré par de nombreux témoins car, avant son intervention, il avait été aperçu parlant à des CRS et à des membres de la BAC en civil. Cet homme a certainement été repéré par les nombreuses caméras de surveillance de la gare. Bien évidemment, ces images n’ont pas été produites par ceux qui se sont évertués à dénoncer les « casseurs » qui seraient venus des banlieues. (Source, Le Nouvel Observateur, en ligne, 30 mars 2007)

Gare du Nord : après la provocation, les menaces

Un jeune internaute, interviewé à plusieurs reprises, après avoir été l’un des premiers à mettre en ligne les images des premiers affrontements de la gare du Nord, affirme avoir reçu sur son téléphone portable un message anonyme révélateur. Ce témojn raconte : « Après mes interviews dans Le Monde et Le Parisien, j’ai reçu des menaces dde la part de personnes qui semblent de la police. » Les propos tenus étaient sans équivoque, avec la vulgarité en supplément : « Sale enculé ! C’est pour te dire qu’on va s’occuper de ton cas !Alors là mon pote, tu vas morfler, j’te l’dis. Tu vas en bouffer du bougnoule. Sale con ! » Suite à cette menace, ce témoin affirme avoir contacté par deux fois la police, mais qu’à chaque fois on lui a raccroché au nez. (Source, Le Nouvel Observateur, en ligne, 31 mars 2007)

Toujours la gare du Nord

Le 30 mars, la préfecture de police de Paris reconnaissait s’être trompée sur la présentation faite du jeune homme contrôlé sans titre de transport, à la gare du Nord, le 27 mars 2007. Il est désormais évident que si ce voyageur était effectivement démuni de titre de transport, ce n’était pas le délinquant multirécidiviste que la police avait montré du doigt. Affirmation reprise immédiatement par le futur ex-ministre de l’Intérieur, François Baroin. Ce mensonge d’Etat ne peut plus masquer le dérapage policier, ce soir-là. Une lettre de lecteur, parue dans Libération, nous éclaire sur le climat qui pouvait régner dans cette gare :

« Me voici dans cette gare du Nord, coincé dans un climat de grande violence : CRS et militaires en battle dress, avec mitraillette, en grand nombre, partout, isolant une zone où il ne se produisait rien, en tenue de combat avec chiens. Je puis le jurer : la foule qui grondait avait raison. Les personnes les plus pondérées étaient abasourdies par un tel déploiement, une telle arrogance, l’absence de tout civil apte à expliquer et à calmer le jeu, étant donnée l’origine infime d’une des gares les plus fréquentées d’Ile-de-France. A l’heure de pointe…

La foule assemblée était la France rebelle, sans peur, toutes générations et origines mêlées, goguenarde, insolente, déprimée, hors d’elle face à ce que l’on pourrait appeler une armée d’occupation civile. J’en pleurerais…Cette fois-ci, personne n’est mort ni n’est grièvement blessé, pour un tourniquet sans ticket et la bagarre qui s’en est suivie. Mais c’était le modèle réduit du pire qui puisse nous arriver, la dramaturgie grotesque, très dangereuse, d’une grande peur institutionnelle et des dérives qu’elle entraîne… » (Source, Libération, 31 mars 2007)

Démocratie policière …

Les événements qui se sont déroulés à la gare du Nord, dans la soirée du 27 mars 2007, ne font que démontrer le danger représenté par des forces de l’ordre prêtes à remettre en cause les libertés fondamentales sous le moindre prétexte.

« L’émeute », provoquée par les CRS, les BAC, et les militaires appelés en renfort, ne fait que rappeler l’usage qu’un pouvoir « énergique » pourrait faire de cette véritable armée de l’ordre en cas de résistance à l’instauration d’un régime qui n’aurait plus démocratique que le nom.

Le résultat des élections présidentielles risque d’être le signal d’un retour à des pratiques anciennes, qui, hélas !, n’ont laissé que peu de souvenirs dans la mémoire d’une population plus anxieuse de l’évolution de son pouvoir d’achat que de la remise en cause des principes de la démocratie.

Il faut être bien persuadé que la victoire des lointains héritiers du gaullisme, alliés de fait avec les nostalgiques du régime de Vichy, préluderait à l’instauration d’une dictature de fait, où le citoyen n’aurait plus que le droit de se taire. Cela sous la haute surveillance d’une police au pouvoir illimité – et peut-être incontrôlé.

Rappelons-nous cette réflexion de Denis Langlois, en mai 1986, après le retour de Charles Pasqua au ministère de l’Intérieur : « On rêve d’uniformes bleus et on découvre des chemises brunes. »

L’Observatoire des Libertés publiques

C’était donc vrai …

Le 29 mars, Georges Frêche, président de la région Languedoc/Roussillon, a été relaxé par le tribunal correctionnel de Montpellier. Après la révolte des banlieues de l’automne 2005, il avait laissé entendre que des policiers avaient eux-mêmes brûlé des voitures à cette époque. D’où poursuite en diffamation par la police – laquelle en a été pour ses frais. (Source, Libération, 30 mars 2007)

Petits grossistes

Le 29 mars, le parquet de Strasbourg a requis la mise en examen d’une greffière du tribunal, en compagnie d’un policier de la brigade des stups. Associés, ces représentants de la Justice et de l’ordre public disposaient d’un petit stock de 4,5 kilos d’héroïne. (Source, Libération, 30 mars 2007)

Police en gare

Le 30 mars, des policiers ont encerclé les salariés d’une entreprise de nettoyage, en grève à la gare d’Austerlitz. Ila avaient eu le mauvais goût de manifester sur leur lieu de travail. Ce même jour, des braqueurs s’étaient attaqués au bureau de poste de Saint-Mandé (94) mais la police n’est arrivée que bien après les faits. On ne peut pas être partout à la fois… (Source, Libération, 30 mars 2007)

Police au rendement

Le 31 mars, un chauffeur de bus toulousain a relaté les conditions d’une garde à vue au commissariat « pour un feu rouge qu’il aurait grillé », le 26 mars. Il raconte : « Six jours après les faits, j’ai été convoqué dans un commissariat de quartier, interrogé puis transféré au commissariat central où j’ai passé quatre heures en garde à vue, en chaussettes, et traité comme un moins que rien. » Ce dérapage policier n’étant que la conséquence de l’exigence de la hiérarchie de faire du chiffre. (Source, La Liberté de l’Est, 1er avril 2007)

Rétrécir les CRS ?

Bonne ou mauvais intention, le syndicat des commissaires de la police nationale propose de réduire de moitié les effectifs des CRS, jugeant disproportionnée cette force répressive. Etonnant, mais bonne idée quand même. (Source, Libération, 3 avril 2007)

Grandes manœuvres

Cela se passe à Ecquevilly (78), le 3 avril. 130 gendarmes ont été mobilisés pour une opération de contrôle des parties communes et d’appartements squattés à la Cité du Parc. (Source, Matin-Plus, 4 avril 2007)

Récidiviste !

Le policier qui avait tué un supporteur du PSG, en novembre dernier, s’est retrouvé sur le banc d’infamie, le 3 avril, pour une toute autre raison : il était poursuivi pour escroquerie et avoir affirmé être victime d’un enlèvement. (Source, Libération, 4 avril 2007)

Tabasseurs

Le 3 avril, deux policiers parisiens ont été condamnés à trois mois de prison avec sursis et à cinq mois de suspension. Qu’avaient-ils fait ? Peu de chose ! Dans la nuit du 31 décembre, ils s’étaient livrés à un tabassage en règle, à une sortie de métro, contre un usager qui venait d’allumer une cigarette. Résultat : hématomes frontal et autour de l’œil, plaie sur une cuisse, etc. Il est vrai que la victime se prénomme Hakim, et que cela devait se voir… (Source, Métro, 4 avril 2007)

L’héritier

Interviewé sur France 3,le 3 avril, le futur ex-ministre de l’Intérieur, François Baroin, s’est appliqué à répéter la leçon administrée par son prédécesseur : « La sécurité reste un élément de préoccupation…C’est un élément plus permanent et plus récurrent, et qui fait partie de l’évolution à laquelle nous devons nous adapter ! » Moralité ? (Source, Le Monde, 4 avril 2007)

Neutralité policière

Le 4 avril, quelques dizaines de militants accompagnaient José Bové et Olivier Besancenot aux abords de l’Elysées. Ob jet : la dénonciation de la mise au point par la France d’un missile d’une portée de plus de 800 km. A l’approche du palais présidentiel, les policiers stoppaient rudement ce petit cortège et José Bové était jeté à terre. (Sources, Images sur Arte, 4 avril, Libération et Matin-Plus, 5 avril 2007)

Cadreur attentif

Si un étudiant de Mont Saint-Aignan (banlieue de Rouen) n’avait pas eu le réflexe de filmer une scène de violences policières qui se déroulait au pied de son immeuble, le préfet de Seine-Maritime n’aurait pas eu l’opportunité de saisir le ministère de l’Intérieur pour que soit diligentée une enquête suite à une intervention policière musclée. Sur les images communiquée par cet étudiant, il est possible de voir, entre autres câlineries, des policiers plaquer la tête d’un homme sur le capot d’un véhicule et d’autres donner des coups de pied à un homme jeté à terre. Il n’en reste pas moins que, selon le préfet : « L’enquête devra déterminer si la riposte des agents était proportionnée et s’il y a eu des coups après la maîtrise des contrevenants… » En attendant, les victimes des brutes feront l’objet de poursuites pour outrage et rébellion. (Sources, Images sur Canal +, France 5 et M6, Le Parisien et Libération, 6 avril 2007)

Dans les cités

Regard d’un journaliste porté sur une cité placée sous haute surveillance policière :

« …Ils sont quinze, plantés sous les arbres, face aux tours, face à leurs habitants, surtout. Casqués, visière abaissée, la matraque à la main, le bouclier contre la poitrine, sur le qui-vive. Des CRS déployés comme par temps d’émeute. Devant eux, la vie s’écoule tranquillement à la cité sensible dite des Tarterêts, à Corbeil-Essonne… Une mère maugrée, en montant dans sa voiture : « Je ne sais pas ce qu’ils cherchent. Ils sont là pour provoquer. Il ne se passe rien… » Des jeunes se disent « enfermés » dans ce quartier quadrillé par la BAC et les CRS. Ils ne supportent plus ces policiers « qui ont oublié l a politesse, qui font comme si on avait tué quelqu’un… » (Source, Libération, 7 avril 2007)

Conduite à risque

Le 9 avril sur l’autoroute A 42, à Vaulx-en-Velin (69) un fourgon de CRS, qui circulait peut-être trop rapidement, s’est un peu frotté à deux voitures, provoquant 3 blessé graves et trois CRS commotionnés. Les policiers devaient être particulièrement pressés, et sans doute peu respectueux des autres véhicules. (Source, Matin-Plus, 10 avril 2007)

Flingueur local

De trop nombreuse municipalités ont cru nécessaire de s’offrir leur propre police. Certaines de ces forces locales ont même été dotées d’arme s de poing. Dans les métiers du maintien de l’ordre, on apprend rapidement les mauvaises manières : c’est ainsi que le 7 avril, à Loudéac (22), un policier municipal s’est cru autorisé à tirer sur un mineur qu’il soupçonnait d’avoir volé un scooter. Ce policier de complément a certes été mis en examen, le 8 avril, mais ses collègues n’ont pas rangé leurs armes au ratelier. (D’après Le Monde, 10 avril 2007)

Tournez manèges

Lorsqu’un simple quidam est victime d’un accident mortel sur un manège de la Foire du Trône, à Paris, on appelle les pompiers ou, en tout cas, une ambulance. S’il s’agit d’un policier, il en va différemment. Arès la mort, sans doute accidentelle d’un policier, le 9 avril, ce sont trois douzaines de policiers qui arrivaient en renfort sur les lieux du drame, tandis que les accès à la fêtes étaient immédiatement bouclés. Comme l’a immédiatement proclamé Nicolas Sarkozy : « Encore un policier victime du devoir… » (Source, Libération, 11 avril 2007)

Sous haute protection

Nicolas Sarkozy n’est plus ministre de l’Intérieur. Il n’en bénéficie pas moins d’une importante protection policière. Ainsi, le 4 avril, lors d’un déplacement sur les bords de la Seine, à Paris, 60 à 100 policiers étaient de service pour assurer sa sécurité : « Un dispositif équivalent à celui déplacé pour un chef d’Etat », selon un haut gradé de la préfecture de police. En plus, le candidat UMP à la présidence de la République bénéficiait d’une protection rapprochée, augmentée de l’appoint d’une unité cynophile pour « optimiser l’opération », tandis que la police urbaine de proximité exerçait la surveillance indispensable autour des stations de métro et du RER proches. Sans oublier les fonctionnaires des RG qui patrouillaient dans les parages. (Source, Le Canard Enchaîné, 11 a avril 2007)

Les brutes du Nord

A Lille, la coordination régionale de l’immigration a ouvert une cellule de veille pour témoigner des violences policières. Cette structure a été créée après le passage à tabac, dans les locaux de la police aux frontières, d’un étudiant guinéen, le 15 mars. Le 7 avril, un père de famille a eu deux côtes cassées et des plaies au visage, lors d’un contrôle de police à Roubaix. (Source, Métro, 12 avril 2007)

Outrage

Le 11 avril, les membres d’un groupe de rap nantais sont mis en examen. Il est reproché à ces musiciens le contenu d’un clip intitulé : « Colt 44 », peu sympathique envers la police et diffusé durant l’été 2006. La plainte émanait du syndicat de policiers UNSA (de gauche, paraît-il), pour « délit de provocation d’actes pouvant porter atteinte à la vie, à l’aide d’un moyen de communication » – en l’occurrence Internet – et « injures publiques envers un fonctionnaire. » Heureusement que la peine de mort a été abolie en octobre 1981… (D’après Le Monde , 13 avril 2007)

Suicide à la préfecture

Le 12 avril, un gardien de la paix, en poste à la préfecture de Paris, se tirait une balle dans la tête, avec son arme de service. Le 13 avril, ce policier, âgé de 27 ans, décède des suites de ses blessures. Pour ses supérieurs, il n’y avait « pas de signes précurseurs à ce geste. » (Source, Libération, 14 avril 2007)

Manège (suite)

Il ne sera pas dit que le policier victime d’une bousculade à la Foire du Trône, le 9 avril, soit mort sans qu’il y ait un coupable désigné. Finalement, les policiers enquêteurs, après avoir mis quatre jeunes en garde à vue, ont réussi à faire avouer un garçon de quinze ans qu’il avait poussé le policier pour se dégager. Peu importe que ce garçon se détractera rapidement. Pour les policiers et le procureur l’aveu initial suffit. C’est ainsi que cet adolescent risque d’être jugé pour « coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort, sans intention de la donner. » La morale policière est sauve ! (Source, Libération, 14 et 16 avril, France Info, 15 avril 2007)

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